ENTREPRENDREPODCASTScale

Cap sur l’Allemagne, ce qu’il faut savoir avant d’y développer sa startup

📩 Pour nous contacter: redaction@frenchweb.fr

Dans cette dernière course avant la période estivale, nous vous donnons rendez vous dans une nouvelle série de FRENCHWEB BUSINESS consacrée au développement de sa startup en Allemagne.

Au cours des différents épisodes, nous explorerons les rouages de l’écosystème de startups allemand, qui abrite près de 6 000 startups et a attiré environ 10 milliards d’euros d’investissement en 2022.

L’Allemagne, avec son PIB de près de 3,85 trillions de dollars et un taux de chômage relativement faible de 4,2%, offre une économie forte et stable. Son riche vivier de talents, son soutien gouvernemental significatif et sa scène dynamique de startups, en particulier à Berlin qui héberge environ 40% de toutes les startups allemandes, font d’elle une destination de choix pour les entrepreneurs du monde entier.

Mais comment naviguer dans ce paysage complexe ? Quels sont les secrets des startups qui réussissent en Allemagne?

Nous entendrons des experts de l’écosystème allemand, des entrepreneurs et des investisseurs chevronnés partager leurs expériences, leurs conseils et leurs prédictions sur l’avenir de la scène des startups en Allemagne.

Pour ce premier numéro je suis ravi d’accueillir Celia Maury, qui a été l’une des premières collaboratrices de Doctolib en Allemagne et qui accompagne aujourd’hui les startups qui souhaitent pénétrer le marché allemand, aux coté de Cyril Bertrand le Managing Partner du fonds d’investissement franco allemand xAnge.

Cap sur l’Allemagne : Ce qu’il faut savoir avant d’y développer sa startup

Berlin, Munich, Hambourg… les métropoles allemandes attirent de plus en plus de startups françaises en quête d’un relais de croissance. Pourtant, derrière l’apparente proximité culturelle, les écueils sont nombreux. Célia Maury, consultante go-to-market installée à Berlin, et Cyril Bertrand, associé du fonds Xange, livrent un éclairage sans concession sur les réalités du terrain.

Une géographie du venture décentralisée

Contrairement à la France, où Paris concentre l’essentiel de l’activité tech, l’Allemagne fonctionne sur un modèle polycentrique. Berlin concentre environ 55 % du volume investi, portée par la présence de fonds américains et anglo-saxons. Munich suit avec environ 25 %, notamment sur le segment B2B. Les autres villes, de Francfort à Hambourg, restent très en retrait. Pour Cyril Bertrand, cette structuration rend le marché plus dense mais aussi plus exigeant : « En France, après Paris, il n’y a pas de numéro 2 évident. En Allemagne, Munich tient tête à Berlin. »

Le Mittelstand, cet inconnu français

Le cœur économique de l’Allemagne bat dans ses PME-ETI industrielles, souvent familiales, connues sous le nom de Mittelstand. Elles sont parfois centenaires, très rentables, et jouent un rôle décisif dans la stabilité du tissu productif allemand. « Ce sont des boîtes super bien établies, assez conservatrices et très puissantes », observe Bertrand. Ces entreprises, très ancrées localement, échappent souvent au radar des startups françaises. Leur compréhension est pourtant essentielle pour qui veut percer.

Pas d’effet “French Tech”

En Allemagne, le branding national ne fait pas recette. « Une startup qui vient de France n’éveille pas un intérêt particulier », constate Célia Maury. Lors de l’arrivée de Doctolib à Berlin, où elle pilotait les premiers recrutements, les retours étaient clairs : « On nous disait ‘ok, vous avez fait vos preuves en France, mais ici on ne vous connaît pas’. » L’effet de notoriété d’un succès français ne pèse que très peu. Ce qui compte : une première référence allemande, un partenaire local, un investisseur national. Et, surtout, une capacité à adapter le discours au marché.

Recruter en Allemagne : cher et complexe

Le marché du travail allemand est structurellement tendu. Les profils sont rares, les salaires souvent 20 % plus élevés qu’en France. « Pour des fonctions comme le commercial, il est difficile de recruter sans passer par un chasseur de tête », souligne Maury. Les entreprises françaises découvrent souvent trop tard que leurs standards RH ne suffisent pas. L’âge moyen d’entrée dans la vie active est plus élevé, et les profils sont plus spécialisés. « Il faut oublier la logique des grandes écoles françaises. Ici, on forme des experts, pas des généralistes. »

Croissance organique ou rachat ?

Face à la difficulté d’implantation, plusieurs startups françaises optent pour la croissance externe. C’est le cas de Malt, qui après une tentative initiale de développement organique, a acquis Comatch. Une solution plus rapide, mais pas forcément synonyme d’échec. « Racheter une boîte, c’est aussi acquérir une équipe opérationnelle déjà en place, une culture, une compréhension du marché », analyse Maury. Le contexte économique actuel, moins favorable aux levées de fonds, rend cette option encore plus pertinente.

Pas d’État pour vous tenir la main

Si la France s’appuie sur la BPI, le label French Tech et des dispositifs comme le JEI, l’Allemagne privilégie une approche plus libérale. Le rôle de l’État est limité. « Il existe un équivalent de la BPI, la KfW, mais à un niveau bien moindre », précise Bertrand. Les aides régionales comme Berlin Partner existent, mais elles restent marginales. « Vous voulez venir ? Venez. Mais vous ferez sans nous. » L’approche est claire.

Une culture du scaling à l’américaine

Le modèle allemand s’est forgé dans une logique d’exécution massive, inspirée de Rocket Internet. « Ils ont souvent levé des centaines de millions très rapidement, avec des méthodes proches de celles de la Silicon Valley », explique Bertrand. Cette agressivité, assumée, se double d’une capacité à fonctionner en équipe. « Ils sont collectivement combatifs, ce n’est pas un héros seul contre tous, mais une équipe soudée. »

Berlin, carrefour de l’Europe de l’Est

La capitale allemande reste une porte d’entrée vers l’Est du continent. Berlin attire une large communauté tech issue d’Europe centrale, où les profils techniques sont nombreux. « On entend une grande diversité de langues slaves dans les bureaux. Ce sont souvent des profils très qualifiés et parfaitement anglophones », souligne Bertrand. Une richesse qui conforte Berlin comme hub d’innovation européen.

France-Allemagne : partenaires et rivaux

Sur le segment du capital-risque, l’Allemagne et la France sont désormais d’égale importance. « On se partage 10 à 15 milliards d’euros de venture par an, avec des cycles comparables », note Bertrand. Si la Grande-Bretagne reste le poids lourd européen, la relation franco-allemande demeure ambivalente. Pas tout à fait rivaux, pas totalement partenaires. « Ce sont nos frères égaux. Mais ils n’ont pas besoin de nous. Et si on veut exister là-bas, il faut le prouver. »

Vous pouvez retrouver le podcast SCALE sur Spotify, Apple Podcast ou Deezer Si vous appréciez l’émission, n’hésitez pas à nous laisser un petit commentaire, ou une note sur Apple Podcast.
Suivez moi
Bouton retour en haut de la page